Réouverture d'un dossier pour erreur judiciaire ?
Posté : 01 nov. 2015, 10:37
Bonjour,
Avant de consulter un avocat, je me permets de me tourner vers vous via ce forum afin d'obtenir avis et conseils:
Voilà 2ans que mon père est décédé. A son décès, je me suis chargée de toutes les formalités administratives.
J'ai même dû remplir un dossier de demande de réversion en faveur de ma mère, mon père n'étant pas en âge d'être en retraite au jour de son décès. C'est au cours de la rédaction de ce dossier auprès de la caisse de retraite que je me suis aperçue que plus d'une année de cotisations retraite manquait à l'appel dans sa carrière (mon père était artisan) :
en effet, en 1985, mon père a été incarcéré pendant presque une année, condamné pour viol. Alors que je n'avais que 6ans et mon frère 3ans, on est venu le chercher chez nous un mercredi après midi pour lui mettre les menottes aux poignets et le déférer à Fleury Mérogis. Condamné pour quelques années, il a finalement purgé une peine de moins de 10 mois pour une raison évidente : erreur judiciaire.
A l'époque, ma mère ne travaillait pas. Elle nous élevait, mon frère et moi, et aidait mon père, qui était à son compte, dans la paperasse (factures, relances, envoi devis etc...) Autant vous dire que pendant cette année, nous nous sommes retrouvés tous les 3 sans un sou, charges URSSAF et crédit immobilier, tout fraichement contracté, continuant à tomber chaque mois... Ma mère a d'ailleurs, pendant ces longs mois, dépensé toute son énergie à tenter de faire prouver, avec l'aide de mes tantes, que mon père était innocent. C'est d'ailleurs grâce à leurs efforts qu'il est sorti de cet enfer. Cependant en plus de la faillite de la société, des dettes qui se sont accumulées et de notre terrain sous scellé pour non-paiement, mon père n'était plus le même, il souffrait d'une dépression qui ne l'a jamais quitté. Les 1ers mois, il faisait les 100 pas, chaque nuit, dans notre salon. Accroc aux anti dépresseurs donnés en prison, qui ont continué à le suivre tout le reste de sa vie, il a développé une agressivité et une violence envers la société. Les années qui ont suivi ont été de vraies montagnes russes entre l'envie de repartir de zéro, des efforts surhumains afin de tout remettre d'aplomb, nous offrir à nouveau une vie correcte et même heureuse, et des zones de turbulences avec tentatives de suicide, périodes d'alcoolisation, médicaments, et toujours beaucoup de violence, envers lui et les autres... Il ne s'en est jamais vraiment sorti. Et je dois dire que nous non plus. Mon frère et moi avons été élevés dans un climat de peur et de rage. Rage contre le système qui nous a tout pris. Qui ne s'est jamais excusé. Qui a détruit notre famille et son équilibre.
Il faut savoir que mon père n'a effectivement jamais entendu d'excuses de la part de la justice française, et encore moins perçu un seul centime de dédommagement.
Mon père est mort à 55ans en 2013 et je reste persuadée que cette histoire y est pour beaucoup.
Aujourd'hui, quand je vois la misérable pension de réversion que ma mère touche chaque mois, et que de surcroît je sais qu'une année de cotisation est manquante -quand bien même elle ne représente que quelques euros par an- sans qu'elle ne soit du fait de mes parents, cette rage au fond de moi grandit au fur et à mesure des années.
Cette histoire, comme je l'ai dit, nous a quelque part détruit. Nous avons appris à grandir avec. Cependant aujourd'hui j'aimerais fermer une porte. C'est pourquoi une idée me trotte dans la tête depuis quelques mois : puis-je faire ré-ouvrir le dossier judiciaire de mon père ? Puis-je demander des excuses de la justice ? Puis-je demander réparation, en l'occurrence au titre de la réversion de ma mère ?
Je crois que j'ai besoin qu'on écoute notre désarroi. Et qu'on l'entende. Et pas que dans le cadre du cabinet du psy.
Ai-je une infime chance, croyez-vous ? Ou cette histoire date-t-elle bien trop ?
Merci de vos conseils, quels qu'ils soient. Et merci de m'avoir lue, c'est déjà un début !
Bon dimanche.
Avant de consulter un avocat, je me permets de me tourner vers vous via ce forum afin d'obtenir avis et conseils:
Voilà 2ans que mon père est décédé. A son décès, je me suis chargée de toutes les formalités administratives.
J'ai même dû remplir un dossier de demande de réversion en faveur de ma mère, mon père n'étant pas en âge d'être en retraite au jour de son décès. C'est au cours de la rédaction de ce dossier auprès de la caisse de retraite que je me suis aperçue que plus d'une année de cotisations retraite manquait à l'appel dans sa carrière (mon père était artisan) :
en effet, en 1985, mon père a été incarcéré pendant presque une année, condamné pour viol. Alors que je n'avais que 6ans et mon frère 3ans, on est venu le chercher chez nous un mercredi après midi pour lui mettre les menottes aux poignets et le déférer à Fleury Mérogis. Condamné pour quelques années, il a finalement purgé une peine de moins de 10 mois pour une raison évidente : erreur judiciaire.
A l'époque, ma mère ne travaillait pas. Elle nous élevait, mon frère et moi, et aidait mon père, qui était à son compte, dans la paperasse (factures, relances, envoi devis etc...) Autant vous dire que pendant cette année, nous nous sommes retrouvés tous les 3 sans un sou, charges URSSAF et crédit immobilier, tout fraichement contracté, continuant à tomber chaque mois... Ma mère a d'ailleurs, pendant ces longs mois, dépensé toute son énergie à tenter de faire prouver, avec l'aide de mes tantes, que mon père était innocent. C'est d'ailleurs grâce à leurs efforts qu'il est sorti de cet enfer. Cependant en plus de la faillite de la société, des dettes qui se sont accumulées et de notre terrain sous scellé pour non-paiement, mon père n'était plus le même, il souffrait d'une dépression qui ne l'a jamais quitté. Les 1ers mois, il faisait les 100 pas, chaque nuit, dans notre salon. Accroc aux anti dépresseurs donnés en prison, qui ont continué à le suivre tout le reste de sa vie, il a développé une agressivité et une violence envers la société. Les années qui ont suivi ont été de vraies montagnes russes entre l'envie de repartir de zéro, des efforts surhumains afin de tout remettre d'aplomb, nous offrir à nouveau une vie correcte et même heureuse, et des zones de turbulences avec tentatives de suicide, périodes d'alcoolisation, médicaments, et toujours beaucoup de violence, envers lui et les autres... Il ne s'en est jamais vraiment sorti. Et je dois dire que nous non plus. Mon frère et moi avons été élevés dans un climat de peur et de rage. Rage contre le système qui nous a tout pris. Qui ne s'est jamais excusé. Qui a détruit notre famille et son équilibre.
Il faut savoir que mon père n'a effectivement jamais entendu d'excuses de la part de la justice française, et encore moins perçu un seul centime de dédommagement.
Mon père est mort à 55ans en 2013 et je reste persuadée que cette histoire y est pour beaucoup.
Aujourd'hui, quand je vois la misérable pension de réversion que ma mère touche chaque mois, et que de surcroît je sais qu'une année de cotisation est manquante -quand bien même elle ne représente que quelques euros par an- sans qu'elle ne soit du fait de mes parents, cette rage au fond de moi grandit au fur et à mesure des années.
Cette histoire, comme je l'ai dit, nous a quelque part détruit. Nous avons appris à grandir avec. Cependant aujourd'hui j'aimerais fermer une porte. C'est pourquoi une idée me trotte dans la tête depuis quelques mois : puis-je faire ré-ouvrir le dossier judiciaire de mon père ? Puis-je demander des excuses de la justice ? Puis-je demander réparation, en l'occurrence au titre de la réversion de ma mère ?
Je crois que j'ai besoin qu'on écoute notre désarroi. Et qu'on l'entende. Et pas que dans le cadre du cabinet du psy.
Ai-je une infime chance, croyez-vous ? Ou cette histoire date-t-elle bien trop ?
Merci de vos conseils, quels qu'ils soient. Et merci de m'avoir lue, c'est déjà un début !
Bon dimanche.